Dans la peau d'un autiste

Un atelier proposé par le Home-Ecole Romand permet de mieux comprendre le quotidien des personnes avec un trouble du spectre de l'autisme.

10 exercices pour comprendre le fonctionnement des personnes TSA © Radio Fr

Deux heures trente d'immersion dans le monde des personnes vivant avec un TSA, un trouble du spectre de l'autisme. C'est ce que proposent Aline Angeloz et Christophe Sallin, éducateurs au Home-Ecole Romand aux Buissonnets à Fribourg. Un outil créé par le Centre de Communication Concrète en Belgique, mais c'est à Paris que les deux Fribourgeois se sont formés à cette "méthode".

Ils ont ensuite lancé une série d'ateliers destinés à un large public, professionnels de la santé et de l'éducation, parents, mais aussi personnel d'entreprises, bref, toute personne souhaitant comprendre comment celles et ceux qui vivent avec un trouble du spectre de l'autisme perçoivent le monde. Et comment ils fonctionnent. Le Covid étant passé par là, les deux éducateurs tentent de relancer l'intérêt pour ces expériences. Et apparemment ça commence à prendre: nous sommes 12 ce lundi soir aux Buissonnets - parents d'enfants TSA, enseignants et journaliste - à nous prêter à l'exercice.

Du concret au concept

Au programme, une dizaine d'exercices. On doit d'abord décrire une image, visible uniquement par un petit trou. Pas facile d'avoir son champ de vision ainsi limité. Et chacun y va de sa technique. Il y a les méthodiques qui scannent l'image de haut en bas ou inversement, et les autres qui vont un peu dans tous les sens. Objectif de l'exercice: comprendre que pour la plupart de gens, voir quelques éléments d'un décor leur permet de rapidement de se situer alors que pour les personnes TSA, le lien ne sera pas évident du tout.

Ne comptez pas sur moi pour détailler les autres postes de cette soirée d'immersion. Vous saurez seulement que l'on a écrit en s'aidant d'un miroir, que l'on a de faire trois actions en même temps ou encore que l'on a assemblé un puzzle assez déroutant, enfin pour ceux qui ne sont pas autistes. Parce que ces derniers justement n'auraient guère eu de difficulté à le résoudre rapidement. Contrairement aux neurotypiques, c'est-à-dire vous et moi, les TSA se focalisent sur la forme des pièces. Alors que nous, nous aurons en tête l'image finale et tenterons de la reconstruire. Eux, partent du concret pour parvenir au concept.

Si faire des puzzles est donc facile pour les TSA, en revanche, gérer les interactions sociales est pour eux un véritable défi. Tout comme recevoir des informations en cascade et qu'ils ne parviennent pas à prioriser. Lumière, bruit et autres stimuli qui pour nous peuvent tout au plus paraître gênants, sont parfois carrément insupportables pour les personnes TSA. De quoi entraîner beaucoup de fatigue et des comportements difficilement compréhensibles pour l'entourage. D'où la nécessité de mieux faire comprendre ce que vivent et ressentent les autistes. "Même nous qui travaillons dans le domaine, on en apprend tous les jours, souligne Aline Angeloz.

Frustration et révélation

Il est près de 21 heures quand l'expérience se termine. Nous sommes passés par diverses émotions: amusement, envie d'en découdre, découragement, frustration même, mais pour beaucoup, c'est aussi une révélation. Comme cette maman de 4 enfants dont un Asperger, une des formes de l'autisme et un pas encore diagnostiqué "ça m'a beaucoup aidée de me mettre à la place de mon fils, déclare-t-elle, j'ai mieux compris comment ça fonctionne dans sa tête, comment il voit le monde." "Il y a des choses, j'avais l'impression que je les savais, mais de les vivre, ça m'a encore plus touchée", confie cette enseignante visiblement émue. Sa collègue, également maman d'un enfant TSA, estime que ça va l'aider à mieux comprendre certaines réactions de son enfant. "Je sors enrichie de cette soirée", conclut-elle.

Ecoutez le reportage complet:

RadioFr. - Sarah Camporini
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