Les violences conjugales n'ont pas d'âge

Le Bureau fribourgeois de l’égalité a organisé une formation consacrée aux violences au sein des couples âgés. Un fléau bien réel.

Difficile d'estimer l'ampleur du phénomène de la violence au sein des couples âgés, puisqu'aucune statistique n'existe passé l’âge de 70 ans. © KEYSTONE

En consacrant une série de discussions et conférences autour des violences conjugales au sein des couples de personnes âgées, le Bureau de l'égalité du canton de Fribourg a mis le doigt sur un fléau peu connu du grand public mais bien réel. Sous-estimées, excusées par la sénilité ou la maladie, invisibilisées par les statistiques, les violences au sein du couple touchent pourtant bel et bien de nombreux seniors et une majorité de femmes.

"Souvent, on associe la violence domestique à des couples jeunes, des couples avec enfants et on a tendance à penser qu'avec le vieillissement, ces questions disparaissent. Or, les personnes âgées vivent les mêmes situations avec des thématiques particulières liées au vieillissement qui compliquent encore l'accès à l'aide", note Delphine Roulet Schwab, professeur à la Haute école de santé La Source à Lausanne, présidente de l’association Alter ego et présidente du Centre national de compétence "Vieillesse sans violence".

Banalisation du fléau

Difficile d'estimer l'ampleur du phénomène, puisqu'aucune statistique n'existe passé l’âge de 70 ans. En 2021, seules 5% des femmes qui ont consulté un centre d'aide aux victimes avaient plus de 64 ans. "Très peu de victimes âgées arrivent aux urgences pour des constats de coups et blessures, alors que les seniors représentent 20% de la population suisse", lance Géraldine Morel, coordinatrice de la lutte contre la violence au sein du couple pour le canton de Fribourg. "Il y a une banalisation de ce phénomène. Quand une personne âgée se plaint: on va lui répondre mais c'est normal à ton âge!", relève Delphine Roulet Schwab.

Le médecin de famille est souvent le médecin des deux conjoints, ce qui peut encore freiner la victime à parler. Reste que ce problème pourrait concerner davantage le seniors que les plus jeunes. "La retraite est souvent un moment de bascule qui redistribue les rôles dans la famille et amène son lot de violences", explique Delphine Roulet Schwab qui rappelle également que le risque de décès est plus important dans le cas des violences domestiques au sein des couples âgés.

"Des homicides ou suicides passent souvent inaperçus. C'est très rare qu'il y ait une autopsie qui soit faite. Il y a des situations d'homicide avec des armes à feu ou le conjoint qui étouffe son épouse avec un oreiller. Ce sont des cas qui sont rarement investigués, y compris pour les suicides car on a cette idée qu'à 90 ans c'est normal qu'une personne ait envie d'en finir", explique Delphine Roulet Schwab.

Cette formation dispensée mardi s'adressait aux professionnels du terrain, comme les infirmiers, les assistants sociaux ou encore des organisations comme la Croix-Rouge.

RadioFr. - Mehdi Piccand
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