Attentat à Paris: le suspect en garde à vue
Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a mis en avant lundi un "ratage" dans le suivi psychiatrique du jeune islamiste radical ayant perpétré l'attentat mortel au couteau près de la tour Eiffel samedi soir à Paris. Celui-ci se trouve actuellement en garde à vue.
Armand Rajabpour-Miyandoab, Franco-Iranien de 26 ans, a été interpellé après l'attaque qui a causé la mort d'un jeune touriste germano-philippin et blessé deux autres personnes, samedi vers 21h30 à proximité du pont de Bir-Hakeim (XVe arrondissement), à quelques mois des Jeux olympiques d'été dans la capitale (26 juillet-11 août).
Quatre personnes - l'auteur présumé, des membres de sa famille et de son entourage - étaient toujours en garde à vue lundi matin, a-t-on appris auprès du parquet antiterroriste.
"Il y a eu manifestement un ratage psychiatrique, les médecins ont considéré à plusieurs reprises qu'il allait mieux", a dit Gérald Darmanin sur BFMTV à propos du jeune homme, radicalisé depuis 2015 et soumis à une injonction de soins impliquant un suivi psychiatrique resserré et contrôlé par un médecin coordinateur.
Le procureur antiterroriste Jean-François Ricard avait indiqué devant la presse dimanche soir que l'assaillant, fiché pour radicalisation islamiste (FSPRT), était "soumis à une injonction de soins impliquant un suivi psychiatrique resserré et contrôlé par un médecin coordinateur" jusqu'à la fin de la mise à l'épreuve le 26 avril 2023, après une nouvelle expertise psychiatrique.
Cette nouvelle expertise avait été demandée par le Pnat au regard de "l'évolution de certains troubles psychiatriques déjà relevés lors de sa détention", a précisé M. Ricard.
"Il y a quelqu'un de malade mentalement, qui ne prend plus de médicaments pour soigner ses délires et qui passe à l'acte incontestablement. Il faut réfléchir à tout ça pour protéger les Français", a insisté le ministre de l'Intérieur.
Allégeance à l'EI
De son côté, le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, a estimé que le parcours "médical, administratif et pénal" de l'auteur de l'attentat était "conforme à ce qui a été prescrit et à l'état du droit", ce qui pose la question de "l'adaptation du droit" selon lui.
"Cette personne est diagnostiquée pour une pathologie psychiatrique et il a été mis en place une obligation de suivi qui a été respectée, c'est-à-dire trois ans de suivi et il y avait toujours un lien avec les services de médecine", a-t-il précisé sur RTL.
Selon les premiers éléments de l'enquête, la mère du suspect avait indiqué en octobre à la police qu'elle s'inquiétait pour son fils, voyant qu'il "se repliait sur lui-même", a rapporté dimanche M. Ricard.
Les services de police avaient alors tenté de le faire examiner par un médecin et hospitaliser d'office, chose finalement impossible en l'absence de troubles, selon une source proche du dossier.
Sa mère, en outre, ne voulait pas demander son hospitalisation forcée. Quelques jours après son signalement, elle avait assuré qu'il "allait mieux", toujours d'après la même source.
Dans un vidéo publiée avant son passage à l'acte sur son compte X, Armand Rajabpour-Miyandoab a fait allégeance au groupe Etat islamique (EI), apportant notamment "son soutien aux jihadistes agissant dans différentes zones", a déclaré M. Ricard.
L'acte a "potentiellement été préparé depuis plusieurs semaines", analyse une source proche du dossier. Les enquêteurs cherchent à déterminer quand les armes de l'agression ont été achetées.
Le touriste germano-philippin de 23 ans a reçu "deux coups de marteau et quatre coups de couteau" et l'assaillant a crié plusieurs fois "Allah akbar", déclarant être "muni d'une ceinture d'explosifs", a précisé M. Ricard.
Il s'en est aussi pris, avec un marteau, à deux sexagénaires, l'un français, l'autre britannique, légèrement blessés, avant d'être maîtrisé par les forces de l'ordre et placé en garde à vue dans les locaux de la section antiterroriste (SAT) de la brigade criminelle de Paris.
"Extrême vigilance"
"Issu d'une famille sans aucun engagement religieux", Armand Rajabpour-Miyandoab s'est converti à l'islam à 18 ans et a "très rapidement" versé dans "l'idéologie jihadiste". Il avait été condamné à cinq ans de prison pour association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un acte de terrorisme, après un projet d'action violente à la Défense, en 2016.
Il était sorti en mars 2020 de prison.
L'assaillant avait "noué des liens avec des individus ancrés dans l'idéologie djihadiste" tel "l'un des futurs auteurs" de l'assassinat du père Hamel à Saint-Etienne-du-Rouvray (Seine-Maritime), selon M. Ricard.
Environ 5200 personnes sont connues pour radicalisation en France, dont 1600 personnes particulièrement surveillées par la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), selon une source au sein du renseignement, qui précise que 20% de ces 5000 personnes ont des troubles psychiatriques.
La France est "durablement sous le coup de la menace islamiste radicale", a insisté dimanche soir Gérald Darmanin, qui a demandé aux préfets une "extrême vigilance" lors de Hanouka, la fête juive des lumières, de jeudi au 15 décembre.
L'attaque est survenue moins de deux mois après celle d'Arras (Pas-de-Calais). Un enseignant avait été tué et le plan Vigipirate relevé au niveau maximal "urgence attentat".