Cinéma suisse: le long chemin vers un Oscar

La Suisse choisira mercredi entre "Reinas" et "Le Procès du chien" pour représenter le pays aux Oscars, dans le cadre d'une nouvelle procédure de sélection en deux étapes.

La prochaine cérémonie des Oscars aura lieu le 3 mars 2025. © KEYSTONE

On saura mercredi qui de "Reinas" de Klaudia Reynicke ou du "Procès du chien" de Laetitia Dosch partira à la conquête d'un Oscar sous la bannière helvétique. Les deux films profiteront d'une manière ou d'une autre de cette nouvelle procédure de sélection en deux étapes nouvellement introduite.

Cette procédure introduite par Swiss Films, l'agence de promotion du cinéma suisse, doit augmenter les chances de gagner un Oscar dans la catégorie "International Feature Film". Suivant l'exemple d'autres pays comme la France, le Danemark ou la Suède, la Suisse a à son tour annoncé une "shortlist".

A la mi-août, la commission de sélection mandatée par l'Office fédéral de la culture (OFC) a annoncé sa présélection pour les Oscars 2025: "Reinas", une histoire de passage à l'âge adulte de la cinéaste helvético-péruvienne Klaudia Reynicke, et la comédie franco-suisse "Le Procès du chien" de Laetitia Dosch.



Depuis la présélection de "L'enfant d'en haut" d'Ursula Meier (2012) et "Ma vie de courgette" du réalisateur valaisan Claude Barras (2016), qui ont raflé des dizaines de prix dans de nombreux festivals, la présence de la création cinématographique suisse aux Oscars était limitée. Pourtant, il y avait eu des succès par le passé.

Xavier Koller par exemple avait remporté l'Oscar du meilleur film en langue étrangère avec "Voyage vers l'espoir" en 1991, suivant les traces du réalisateur français Richard Dembo qui avait réussi la même chose en 1985 avec "La Diagonale du fou", une coproduction franco-suisse. "L'invitation" de Claude Goretta (1973) et "La barque est pleine" de Markus Imhoof (1981) avaient été nominés dans la même catégorie, mais n'avaient pas été retenus.

De l'animal et de l'homme

Pour sa première réalisation, Laetitia Dosch tient également le rôle principal du "Procès du chien". Elle y incarne Avril, une avocate qui, si elle perd une nouvelle fois au tribunal, doit quitter son cabinet. Le fait que son prochain client soit un chien n'arrange pas sa situation. Cosmos a mordu plusieurs personnes, mais il est en même temps le compagnon affectueux et fidèle de Dariuch, un malvoyant.



Pour le comité de sélection, cette comédie philosophique "questionne habilement les opinions sur les droits des animaux et l'attitude envers les femmes dans la société moderne, tout en révélant les convictions, les questions et les aspirations des personnes impliquées dans le procès".

Le film a été présenté en mai dernier au Festival de Cannes, où il était en lice pour le premier prix de la section "Un certain regard" ainsi que pour la Caméra d'Or.

Manque de perspectives

"Reinas" est le premier long métrage suisse à avoir été présenté dans la compétition principale internationale du prestigieux festival de Sundance, à avoir reçu le prix de la meilleure réalisation dans la section “Génération” à la Berlinale et à avoir remporté le prix du public au festival de Locarno.

Dans ce drame sur le passage à l'âge adulte, Klaudia Reynicke raconte l'histoire, inspirée de son autobiographie, d'une mère qui veut quitter Lima pour les Etats-Unis avec ses deux filles, en laissant derrière elles leur père, qui n'a pas grand-chose à leur offrir.

Cette décision est motivée par la crise économique, les troubles politiques massifs et le manque de perspectives d'une vie meilleure dans le Pérou des années 1990. "Reinas" est une histoire tendre et subtilement racontée par une réalisatrice suisse qui a déjà prouvé qu'elle pouvait toucher le c½ur d'un public mondial", a écrit la commission de sélection.

Un chemin semé d'embûches

Bien qu'un seul film puisse être envoyé dans la course aux Oscars, Andreas Bühlmann, Head of Festivals & Markets à Swiss Films, voit des avantages pour les deux productions. D'autant que des conditions plus strictes s'appliquent aujourd'hui.

En premier lieu, un contrat avec un distributeur américain, ou du moins la perspective d'un tel contrat, est nécessaire pour figurer sur la shortlist. Ce qui compte, ce n'est donc plus seulement la force du film, mais aussi le réseau international et le paquet global avec lequel le film peut être promu aux Etats-Unis et auprès des membres de l'Academy of Motion Picture Arts and Sciences (AMPAS).

Le système en deux étapes offre également une visibilité prolongée. "Jusqu'à présent, on choisissait un film en une seule séance", explique Andreas Bühlmann. Et ce, si tôt dans le processus que "les décisions devaient souvent être prises sur la base d'hypothèses". En d'autres termes: avant même que le jury ne sache si l'équipe qui se trouvait derrière était suffisamment bien placée pour avoir de réelles chances de gagner.

Et au lieu de pouvoir se concentrer directement sur les relations publiques, le temps et l'énergie étaient d'abord consacrés à la recherche d'un distributeur américain et à la constitution d'une équipe de promotion.

Après l'annonce du choix du film suisse le 25 septembre, l'Académie des Oscars dévoilera la "shortlist" de 15 films issus des différents pays le 17 décembre. Et un mois plus tard, le 17 janvier suivra la publication des titres nominés. La cérémonie de remise des prestigieuses statutettes aura lieu le 2 mars 2025 à Los Angeles.

ATS
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