Navire d'aide en route vers Gaza

Un premier bateau chargé de vivres progresse jeudi vers la bande de Gaza au moment où les efforts s'accélèrent pour tenter d'acheminer davantage d'aide humanitaire dans le territoire palestinien assiégé et menacé de famine.

"Chacun se bouscule violemment pour obtenir un carton pour ses enfants, pour récupérer une boîte de thon ou de fèves", raconte un témoin dans la bande de Gaza. Ici, une image prise à Rafah jeudi. © KEYSTONE/EPA/HAITHAM IMAD

La distribution de l'aide à Gaza, notamment dans le nord où la situation est critique pour 300'000 personnes, est dangereuse alors que le mois de jeûne du ramadan a débuté cette semaine. La population scrute quotidiennement le ciel en espérant récupérer des vivres lors d'opérations de parachutage, mais les quantités larguées sont limitées.

"Chacun se bouscule violemment pour obtenir un carton pour ses enfants, pour récupérer une boîte de thon ou de fèves", a raconté à l'AFP Mokhles al-Masry, un sac de farine sur les épaules à Beit Lahia. "Tout le peuple est affamé et épuisé".

Dans le sud, à Rafah, des images de l'AFPTV montrent jeudi une foule se précipitant pour ramasser quelques sacs de farine tombés d'un camion acheminant l'aide.

Sans nouvelle trêve en vue après plus de cinq mois de guerre entre Israël et le Hamas, les bombardements israéliens se poursuivent sans répit et ont fait 69 morts ces dernières 24 heures, selon le ministère de la Santé du mouvement islamiste palestinien.

Le gouvernement du Hamas a dénombré jeudi plus de 40 frappes aériennes sur Rafah et la ville voisine de Khan Younès (sud), ainsi que sur Nousseirat, Jabaliya et Beit Hanoun, dans le nord. Des tirs d'artillerie intenses ont également visé plusieurs localités.

Terre et mer

L'aide par voie terrestre n'entre qu'au compte-gouttes dans la bande de Gaza, soumise au contrôle d'Israël qui impose un siège depuis le début de la guerre déclenchée par une attaque sans précédent du Hamas sur le sol israélien le 7 octobre.

Outre les parachutages, un couloir maritime a été ouvert mardi entre Chypre et Gaza (environ 270 km) pour livrer de l'aide avec un premier navire chargé de 200 tonnes de vivres. Ce bateau de l'ONG espagnole Open Arms, qui remorque une barge, était jeudi après-midi au large de la ville israélienne d'Ashdod, au nord de Gaza, selon le site spécialisé Marine Traffic.

Chypre, à l'origine de ce couloir maritime, a annoncé qu'un deuxième bateau était prêt à partir avec une cargaison plus importante.

Quatre bateaux de l'armée américaine ont par ailleurs quitté les Etats-Unis mardi avec l'équipement nécessaire à la construction d'une jetée et d'un quai à Gaza pour débarquer l'aide d'humanitaire "d'ici 60 jours", selon les autorités américaines.

"Pas d'alternative valable"

Mais selon l'ONU, ces options ne peuvent se substituer à la voie terrestre, un constat largement partagé. "Il n'y a pas d'alternative valable aux routes terrestres via l'Egypte et la Jordanie et aux points d'entrée d'Israël vers Gaza pour des livraisons d'aide à grande échelle", ont souligné les Etats-Unis, Chypre, les Emirats arabes unis, l'UE et le Qatar dans une déclaration conjointe.

Une réunion doit avoir lieu la semaine prochaine à Chypre pour des "discussions en profondeur sur l'activation du couloir (maritime) dont les efforts américains", ont-ils indiqué. Ils ont par ailleurs jugé qu'une ouverture du port israélien d'Ashdod à l'aide humanitaire "constituerait un complément bienvenu et significatif" au dispositif.

L'aide par voie terrestre est principalement acheminée de la Jordanie ou de l'Egypte vers deux points de contrôle israéliens du sud de Gaza où les marchandises sont longuement inspectées. Les autorités israéliennes démentent que ces contrôles freinent l'entrée de l'aide.

"Si l'ONU veut voir plus d'aide (aller) vers le nord de Gaza, elle devrait envoyer plus de convois", a affirmé jeudi le colonel Elad Goren, un responsable dans l'organisme du ministère de la Défense chargé des affaires civiles palestiniennes (Cogat).

"Île humanitaire"

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a réitéré jeudi son objectif d'une offensive terrestre sur Rafah, à la frontière fermée avec l'Egypte où sont massés, selon l'ONU, environ 1,5 million de Palestiniens. "Nous entrerons dans Rafah", a-t-il dit, malgré l'inquiétude de la communauté internationale, y compris les Etats-Unis, principal allié d'Israël. Israël doit faire de la protection des civils et de l'aide humanitaire à Gaza sa priorité "numéro un", a déclaré mercredi le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken.

Le porte-parole de l'armée israélienne, Daniel Hagari, a évoqué mercredi la mise en place d'une "île humanitaire" où seraient déplacés les habitants de Rafah avant l'offensive et où ils auraient "un logement temporaire, de la nourriture, de l'eau et des hôpitaux de campagne".

Washington tente toujours, avec le Qatar et l'Egypte, les deux autres pays médiateurs, d'arracher un accord pour une trêve de plusieurs semaines entre Israël et le Hamas. Dans la nuit, le chef du Hamas, Ismaïl Haniyeh, a jugé qu'un accord était toujours possible, appelant Israël - qui refuse un cessez-le-feu définitif et plaide plutôt pour une pause dans les combats tout en exigeant des preuves de vie de ses otages - "à abandonner son intransigeance".

ATS
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