Etats-Unis: les Suisses hésitent à traverser l’Atlantique
Entre désamour politique, taux de change avantageux et concurrence du Canada, le rêve américain divise.

Des agences de voyage se font l'écho d'une baisse de la demande pour les Etats-Unis, par une clientèle refroidie par la politique du nouveau président américain. Les Suisses se montrent plus hésitants et s'orientent vers des destinations alternatives.
L'évolution du taux de change dollar/franc et les promotions sur les billets d'avion rendent les voyages aux Etats-Unis actuellement intéressants. Aubaine pour les uns, tabou pour les autres, la question du tourisme sous l'ère Trump divise les Suisses.
Des chiffres en repli
Environ 380'000 voyageurs en provenance de la Confédération se sont rendus aux Etats-Unis en 2024, selon les chiffres du comité Visit USA (Vusa), oeuvrant pour la promotion des Etats-Unis comme destination touristique. Cette année, l'agence attend entre 310'000 à 330'000 voyageurs.
"Pour la première fois, je pense personnellement que le bonus de crédit et de sympathie pour les Etats-Unis est épuisé par la présidence Trump et qu'il y aura un impact négatif sur les voyages" outre-Atlantique, déclare Heinz Zimmermann, président de Visit USA.
Avant la pandémie, le nombre de voyageurs avoisinait le demi-million, précise-t-il, un chiffre très important en proportion de la taille de la Suisse. Sans l'effet Trump, la barre des 400'000 voyageurs aurait probablement été aisément franchie en 2025, selon lui.
Le taux de change comme baromètre
Le facteur déterminant serait le taux de change. "Ces 20 dernières années, nous avons observé que la demande pour les Etats-Unis dépend plutôt de l'évolution de la paire dollar/franc que du président en exercice", détaille M. Zimmermann. Au dessus des 0,90 franc pour un dollar en janvier, la paire oscille désormais autour 0,82 USD/CHF, renforçant le pouvoir d'achat des Suisses sur place.
La hausse de l'inflation attendue aux Etats-Unis pourrait aussi faire pression sur le budget des ménage et pousser les prix des hôtels et services touristiques à la baisse, des secteurs majoritairement portés par la demande domestique.
Printemps hésitant, été incertain
L'évolution au cours des prochains mois sera décisive. "En mars, nous avons observé une baisse des nouvelles réservations, mais la situation s'est redressée en avril avec une légère hausse enregistrée", déclare M. Zimmermann.
Le retard pris dans les réservations pourra-t-il être rattrapé? Les agences de voyage sont bien placées pour prendre le pouls de la demande, plus de la moitié des voyages aux Etats-Unis (56%) depuis la Suisse étant réservés via l'une d'elles. Le groupe DerTour évoque une baisse de la demande d'environ 15% ces derniers mois.
"Le repli concerne avant tout les nouvelles réservations, tandis que les voyages déjà réservés, en particulier pour l'été et l'automne, ne sont quasiment pas concernés", indique à AWP un porte-parole. "L'intérêt général pour la destination est plutôt en baisse".
Et les voyageurs qui ont déjà réservé se montrent de plus en plus incertains, avec de nombreuses questions au sujet de l'entrée sur le territoire dans le contexte du durcissement de la politique migratoire. Sur ce point, M. Zimmermann est clair: "entre janvier et avril, 113'404 voyageurs sont entrés depuis la Suisse aux Etats-Unis et le taux de refus est de 0,002%".
Le Canada en embuscade
Des destinations alternatives se profilent. Chez DerTour, on pointe une demande réjouissante pour le Canada. Etant donné que ce pays "est une destination très appréciée des voyageurs en camping-car ou voiture de location, nous interprétons ces chiffres comme un possible transfert de la demande vers le nord", explique le porte-parole.
Pour M. Zimmermann, des destinations américaines moins associées dans l'imaginaire collectif aux Etats-Unis, bien qu'en faisant partie, comme l'Alaska ou Hawaï pourraient également profiter d'effets de report de la demande.
Prix en chute libre pour relancer la demande
Pour stimuler la demande et remplir les avions, les compagnies aériennes interviennent à grand renfort de baisses de prix. Chez Swiss, principale compagnie avec United pour les vols directs depuis la Suisse vers les Etats-Unis, s'envoler pour New York fin juillet, en pleine haute saison, est possible pour environ 450 francs depuis Genève.
Depuis Zurich, en vols directs, San Francisco et Miami sont accessibles pour un peu plus de 600 francs pour la première et 850 francs pour la seconde. New-York, la Californie et la Floride sont les principales destinations des touristes suisses, avant Hawaï, l'Alaska et le Nevada.
Selon M. Zimmermann, les prix des vols ont baissé pour deux raisons. D'une part, les capacités pour les destinations américaines ont augmenté continuellement depuis la fin de la pandémie, la concurrence entre les compagnies aériennes s'est donc renforcée, et d'autre part, la demande des clients est en repli.