"Faire de l'humour en tant que femme, c'est politique"

Parmi les jeunes talents, Camille Carron s’impose comme une étoile montante du stand-up. Depuis quatre ans, elle se produit sur les scènes romandes et françaises avec un style unique: un humour décalé, une énergie débordante et une expressivité marquée. 

Mais pour une femme, l’humour n’est pas un parcours simple. Camille Carron s’est souvent interrogée sur sa légitimité. "Monter sur scène et faire des blagues, c'est quelque chose qu'on attend des hommes en général. Il y a déjà une profonde socialisation de la femme de rester dans l'espace privé. Quand on est une femme, faire de l'humour, c'est politique, parce que ce n'est pas quelque chose que l'on attend de nous."

La Fribourgeoise d'adoption se sent ainsi plus à l’aise dans "des milieux urbains de gauche", où les spectateurs sont conscients des défis qu’elle rencontre. Elle participe d'ailleurs ce samedi soir à une soirée TINFA (acronyme de trans, femmes, intersexes, non binaires et agenres) dans le cadre de la Journée internationale des femmes. Toutefois, elle sait qu’elle doit toucher d'autres publics pour évoluer. "Devant des personnes de 50 ans de droite, ça nous fait toujours plus progresser. Finalement, être humoriste, c'est faire rire des gens que l'on ne pensait pas faire rire à la base." 

Cette situation n’est pas propre à Camille Carron: en Suisse romande, les humoristes féminines restent rares, notamment à Fribourg. Bien sûr, certaines femmes ont déjà marqué la discipline, comme Marina Rollman, Julie Conti ou Cinza Cattaneo, qui ont un impact notable dans l’espace francophone. Ailleurs, les réseaux sociaux ont favorisé de nouvelles possibilités pour les femmes, au-delà du stand-up. 

David Vida, humoriste et organisateur de soirées stand-up en scène ouverte au Strap’ Comedy Club, observe lui aussi ce déséquilibre. Selon lui, seulement 10% des humoristes qui osent monter sur scène sont des femmes, et pourtant, l’événement est ouvert à tous, sans distinction.