Funérailles sous haute surveillance à Arras
Les obsèques de Dominique Bernard, poignardé à mort par un ancien élève devant son collège-lycée d'Arras lors d'un attentat jihadiste qui a placé la France en état d'alerte, ont débuté jeudi dans la cathédrale de la ville, avec émotion et sous haute surveillance.
Le chef de l'Etat Emmanuel Macron, son épouse Brigitte et le ministre de l'Éducation Gabriel Attal assistent à la cérémonie, présidée par l'évêque d'Arras Mgr Olivier Leborgne et retransmise sur grand écran sur la place des Héros devant plusieurs centaines de personnes.
Dominique Bernard, mort à 57 ans, a été nommé au grade de chevalier de la Légion d'honneur par la présidence de la République, selon un décret paru jeudi au Journal officiel.
Au son de chants religieux, la voiture transportant le cercueil est passée devant l'hôtel de ville, au pied de l'écran géant, sous le regard parfois humide des centaines de personnes présentes. Une photo de l'enseignant est affichée au-dessus de l'écran.
De nombreux bouquets de roses ont été déposés sur les marches qui mènent à l'entrée de la cathédrale, où patientaient une trentaine d'enseignants et agents du collège-lycée Gambetta, théâtre du drame, a constaté une journaliste de l'AFP.
"Sociable, relax, à l'écoute"
"M. Bernard était gentil, passionné, il aimait nous faire découvrir la littérature, il avait toujours des petites choses en plus à nous dire sur les auteurs qu'il nous présentait", témoigne, la voix tremblante, Maxime, un ancien élève de l'enseignant, venu assister à la cérémonie accompagné de sa mère.
Mattheo Tenti, 18 ans, qui l'a eu comme enseignant en terminale, décrit lui "un prof vraiment sociable, relax, toujours à l'écoute des élèves quand il y avait des problèmes. Une belle personne".
"C'est important d'être là parce que ça aurait pu être lui comme un autre (professeur). C'est des gens qui se lèvent tous les matins pour nous apprendre la vie depuis qu'on est petits", déclare à ses côtés Nathan Delbeke, 19 ans.
Un important dispositif policier était déployé dans une grande partie du centre-ville, avec interdiction de circuler jusqu'à jeudi 15h00.
Onde de choc
Le décès de Dominique Bernard le 13 octobre, survenu presque trois ans jour pour jour après l'assassinat du professeur d'histoire-géographie Samuel Paty en région parisienne par un jeune homme radicalisé, a suscité une onde de choc, en particulier chez les enseignants.
Une minute de silence a été respectée lundi dans tous les collèges et lycées de France en mémoire de Dominique Bernard et de Samuel Paty.
Dans un entretien mercredi à l'hebdomadaire chrétien La Vie, la mère et la soeur de l'enseignant disent espérer qu'il "soit le dernier" professeur assassiné. Lui-même était marié à une enseignante et père de trois filles majeures.
"Si seulement ça pouvait créer un électrochoc pour nous faire dire à tous qu'il faut de la tolérance, pour que la France reste une terre d'accueil", ajoutent-elles.
Inquiétude
La France est passée en alerte "urgence attentat" dès le soir de l'attaque, menée par Mohammed Mogouchkov, 20 ans, un Russe radicalisé qui se revendique de l'organisation Etat islamique.
La cité scolaire Gambetta-Carnot a été évacuée lundi matin après une fausse alerte à la bombe. Le musée du Louvre, le château de Versailles ou encore des aéroports ont également été évacués ces derniers jours.
L'inquiétude s'est encore aggravée avec les meurtres lundi soir à Bruxelles en pleine rue de deux Suédois, un attentat revendiqué par un Tunisien ensuite abattu par la police.
Mohammed Mogouchkov avait semé la panique dans l'établissement d'Arras le 13 octobre au matin, deux couteaux en main, tuant Dominique Bernard avant de blesser trois autres adultes, dont deux grièvement, puis d'être interpellé.
Il a été mis en examen pour assassinat en lien avec une entreprise terroriste, et écroué mardi soir. Son frère de 16 ans l'est pour complicité et un cousin de 15 ans pour abstention volontaire d'empêcher un crime.
Fiché pour radicalisation, il était suivi par la DGSI "depuis la fin du mois de juillet", selon le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, en raison des liens avec son frère, emprisonné pour sa participation à un projet d'attentat visant l'Elysée, et son père, lui aussi fiché S.