"L'ADN d'Emmaüs n'est pas dû à une seule personnalité"
François Mollard, président la Fédération Emmaüs Suisse, revient sur la décision de renoncer aux portraits et aux citations de l'Abbé Pierre.
La Fédération Emmaüs Suisse annonce qu'elle n'utilisera plus l'image de l'Abbé Pierre. Cette décision fait suite aux révélations concernant des faits graves de violences sexuelles commis à l'époque par l'Abbé Pierre. Les représentations de l'Abbé Pierre seront progressivement retirées de la Communauté d'Emmaüs Fribourg, dont le site se trouve à la route de la Pisciculture. Les 18 compagnons (ndlr: des personnes en situation d'exclusion accueillies et logées par Emmaüs) seront intégrés dans la procédure, jusqu'à la fin de l'année.
La Télé: La Fédération Emmaüs Suisse va retirer définitivement l'image de l'abbé Pierre. C'est un signal fort que vous envoyez là.
François Mollard: Oui, je crois qu'il y avait unanimité parmi les membres présents lors de cette Assemblée générale extraordinaire, le 15 octobre dernier. Cette volonté de renoncer à cette image, à ces portraits, était d'entrée de jeu acceptée par tous les membres.
Est-ce qu'Emmaüs peut vivre sans l'image de son père fondateur?
Certainement, je crois que l'idée d'aider les personnes en difficulté va bien évidemment rester. On est une association, parmi d'autres, qui doit s'occuper des personnes en difficulté, vulnérables. L'ADN d'Emmaüs va rester, elle n'est pas due à une seule personnalité, aussi grande soit-elle.
On imagine que cette décision a été très émotionnelle...
Il y a eu effectivement beaucoup d'interventions. Ça s'est passé dans la paix, parfois avec un peu d'émotion, de tristesse, d'incompréhension, de consternation. Le sujet, évidemment, induit ce genre de réaction de la part de personnes qui s'investissent quotidiennement, pratiquement 24 heures sur 24, dans une dimension sociale.
A Fribourg, il y a encore des peintures murales de l'abbé Pierre. Comment la décision a été accueillie dans la communauté?
C'est accueilli avec de la tristesse. Mais l'avenir passe par-dessus cette tristesse et cette émotion. À Fribourg, qui compte une cafétéria au nom de l'Abbé Pierre, on a eu une discussion ouverte avec les compagnons. Et la décision qui a été prise, qui personnellement me touche, c'est de renommer cet espace, "La cafétéria des Compagnons".
Vous lancez aussi un programme de formation sur la problématique des violences sexistes et sexuelles.
C'est certain que, comme d'autres associations d'ailleurs, mouvements sportifs, mouvements autres, on doit absolument être présents sur cette thématique. Avec ces révélations, c'est vrai qu'on doit être plus professionnels encore par rapport à cette dimension de violences sexistes et sexuelles. Et on va de l'avant avec cette dimension.