L'éducation canine obligatoire dans le canton de Fribourg

Depuis le 1ᵉʳ janvier 2024, les nouveaux détenteurs de chien doivent suivre des cours. L'éducatrice, Océane Clerc, explique leur contenu.

L'éducatrice canine, Océane Clerc, conseille d'évaluer son budget financier avant d'adopter un chien. Les dépenses pour un compagnon peuvent s'élever jusqu'à 40'000 frs en moyenne. © KEYSTONE

Un article a été récemment publié sur les changements qui s'opéreront dans le canton en 2024. Les cours obligatoires pour chien font partie du lot. Tous les nouveaux détenteurs de chien ou les maitres qui n'ont pas possédé de chien depuis dix ans doivent suivre un cours théorique de cinq heures. Ils seront également soumis à un examen pratique auquel ils doivent s'inscrire dans les 18 mois qui suivent l'enregistrement de leur chien dans le système "Amicus" (registre de données des identités pour chien en Suisse). 

L'éducatrice canine de Marly, Océane Clerc, nous fournit plus de détails sur le contenu des cours théorique et pratique qui peuvent être suivis auprès d'une structure ou d'un éducateur particulier. Interview. 

À quoi sert de suivre ce cours théorique et de réussir l'évaluation pratique ? 

Le but de ces évaluations est de sensibiliser les futurs détenteurs aux enjeux de la garde d'un chien. Autrement dit, le nouveau maître sera informé sur les caractéristiques spécifiques de certaines races, à l'investissement en temps et en argent qu'une telle acquisition engendre. Il sera aussi sensibilisé à l'impact de son protégé sur la faune environnante et sur la population. 

Plus concrètement, chaque race a sa particularité comportementale ou génétique. Il est tout à fait possible qu'une sorte de chien soit encline à une maladie génétique. Dans ce cas, il faut prévoir un budget pour les soins. Il est aussi nécessaire d'être renseigné à l'attention qu'il faut lui apporter et savoir interpréter ou anticiper ses réactions face à certaines situations. D'ailleurs, on estime qu'un "toutou" vit douze ans en moyenne et que cela représente environ 25'000 frs à 40'000 frs de dépenses tout au long de son existence. 

Qu'est-ce qu'on apprend dans le cours théorique ? 

Les éducateurs abordent la législation suisse, les obligations du détenteur et la manière d'acquérir un chien. Nous apportons une attention particulière aux besoins et à la façon de s'en occuper, c'est-à-dire veiller à son bien-être et à son comportement. Les éléments appris en théorie sont primordiaux pour faire connaissance avec l'animal et le respecter. 

Il faut imaginer qu'un chien qui débarque dans une famille est comparable à l'arrivée d'un nouveau-né. Les détenteurs doivent être conscients qu'il faut que leur emploi du temps soit adapté aux besoins de l'animal. Il est vital en l'occurrence de le promener toutes les deux heures lorsqu'il est au stade de chiot, de lui prévoir un coin de retrait et d'adapter son alimentation. 

Quelles thématiques abordez-vous lors des séances dédiées à la pratique ?

Nous insistons sur la sociabilisation du chien avec les êtres humains et en particulier les autres compagnons. En théorie, il existe une phase sensible durant les trois premiers mois, où il est capital de lui apprendre que les autres partenaires à poils longs ne sont pas des adversaires ou des menaces. 

Au départ, ils doivent également enregistrer les ordres de base tels que le "rappel". En mentionnant son nom à voix haute ou en sifflant, il devrait pouvoir se stopper dans son activité et revenir vers le maître. Cette injonction est aussi utile pour l'éloigner de la circulation, d'un être humain ou d'un autre chien. 

Nous parlons encore de l'importance du séquençage. En d'autres termes, le détenteur doit désigner des moments précis pour le repas ou le temps de jeu... cette méthode permet d'éviter l'activation des "patrons-moteurs" (ex. instinct de prédation) de course poursuite, si le chien croise un autre animal, par exemple. 

Même s'il atteint l'âge adulte, rien n'est perdu. Il est toujours possible de trouver des solutions afin de réajuster son comportement. Toutefois, s'il advenait à se montrer récalcitrant, il ne faut pas hésiter à prendre rendez-vous avec un éducateur. 

Quelles sont les questions récurrentes auxquelles vous êtes confrontée lors de vos cours ? 

En cinq ans de pratique dans le domaine, je dois souvent revenir sur l'aspect de l'obéissance. C'est un point qui demande de la patience et de la ténacité. Mais, il est nécessaire avant tout de s'intéresser aux causes et comprendre à quels moments certains comportements se déclenchent. 

C'est quoi le contenu du test pratique, couramment appelé le "test de conductibilité" dans la discipline ? 

Un test qui permet d'évaluer si le chien représente un danger pour la population, la faune et les autres chiens, en lui faisant effectuer des exercices. Les personnes intéressées peuvent retrouver le contenu sur le site du canton. Il y a notamment du travail en laisse, les ordres de base, la garde sous contrôle et la manipulation de l'animal. 

Pensez-vous que les cours théoriques pourraient être un moyen de limiter le phénomène d'abandon ? 

Oui, j'en suis certaine. Malheureusement, le taux d'abandon reste encore élevé. Je suis persuadée que si le détenteur effectue la théorie avant l'acquisition et qu'il s'applique à la pratique, il y a de forte chance que la cohabitation se fasse correctement. Il aura beaucoup de connaissance sur les spécificités de la race et il sera conscient des enjeux. 

Lorsque l'on adopte un chien, il faut aussi se poser la question des voyages ou des vacances : ai-je un moyen de le placer ? Si oui, est-ce que j'ai le budget ? Je pense qu'il faut faire attention à ces détails, car les abandons surviennent aux moments où les maitres décident de changer de déménager ou de faire un long séjour. 

Que représente le coût des cours pour les nouveaux détenteurs ? 

Il faut compter entre 60 frs et 200 frs, mais tout dépend des tarifs de chaque éducateur qu'ils fixent eux-mêmes. En général, ils proposent des packs comportant les cours de théorie et pratique, il faut se renseigner sur leur site respectif pour en savoir davantage. 

Il faut noter qu'ils sont responsables de donner les cours et l'État attend d'eux qu'ils apportent leur touche personnelle. Ils évaluent par ailleurs l'examen de conductibilité et remplissent la grille d'évaluation qu'ils doivent pouvoir mettre à disposition du Service de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires du canton de Fribourg en cas de problème (ex. cas de morsure d'un chien). Ils prévoient aussi un temps pour le côté administratif afin de finaliser les attestations et de déterminer la réussite du cours. 

RadioFr. - Lauriane Schott / Adaptation web: Yann Girard
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