Etienne Daho, B.B, Macron rendent hommage à Jane Birkin

Les hommages se multipliaient lundi au lendemain du décès de la chanteuse Jane Birkin, retrouvée morte à son domicile à 76 ans.

Jane Birkin, icône des années 60 et 70, de "La Piscine" à la scène. © KEYSTONE

Sur Twitter,Brigitte Bardot a publié une photo d’une lettre qu’elle a elle-même rédigée à la main. "Dimanche 16 juillet, bien triste! J’ai un gros chagrin, Jane Birkin est partie! [...] Quand on est aussi jolie, aussi fraiche, aussi spontanée, avec une voix d’enfant, on n’a pas le droit de mourir", a-t-elle écrit. Toutes deux furent les compagnes de Serge Gainsbourg, puis se retrouvèrent, en 1973, dans le film Don Juan 73.



L'hommage le plus émouvant est peut-être venu d'Etienne Daho, qui a écrit un long message à l'adresse de la disparue, lundi sur les réseaux sociaux. "J'ai aimé ta voix unique, haut perchée et si singulière, ton écriture libre, poétique et culottée, tes engagements. Toujours honnête. Toujours légère. Toujours trop modeste et généreuse, attribuant tes réussites aux autres", glisse le "parrain" de la pop française, qui avait co-composé avec elle son album "Oh ! Pardon tu dormais..." (2020).




"Nous avons accompagné ce chapitre de ta vie sur disque et sur scène. Défiant toutes les lois de la médecine, guerrière devant l'éternel, tu as surmonté tes souffrances, sans une plainte et avec le sourire, pour remporter chaque soir de triomphales victoires, devant un public ému aux larmes. Une leçon", dit-il encore dans sa lettre.

De Sheila à Clara Luciani, en passant par Benjamin Biolay, Alain Souchon et Françoise Hardy, de nombreuses voix de la chanson française ont rendu hommage à Jane Birkin.

Le chanteur Miossec s'est lui aussi dit ému par sa disparition. "Jane Birkin est la première à être venue me chercher pour des paroles", souligne le Brestois, au Télégramme, rappelant l'attachement de Jane Birkin au Finistère (ouest de la France) où elle avait une maison.



Après Hermès, qui avait créé un sac à son nom, Olivier Rousteing (Balmain), Jacquemus, c'est au tour du créateur de mode Hedi Slimane de lui rendre hommage. Il a publié sur Instagram une photo de Birkin en smoking et chemise blanche pour une campagne Saint Laurent de 2016, accompagnée des paroles d'"Ex fan des sixties".

Des fans laissent des mots sur la façade de la maison de Jane Birkin et Serge Gainsbourg, à Paris.

"Je t'aime, moi non plus"

Jane Birkin a connu un succès mondial avec des chansons comme "Je t'aime... moi non plus", duo avec Gainsbourg en 1969 au parfum de scandale, "Jane B" la même année ou "Ex-fan des sixties" en 1978.

Le public l'appréciait pour sa sensibilité, soulignée par le délicat accent britannique qu'elle a conservé toute sa vie.

Longtemps après le décès de Serge Gainsbourg en 1991, et en dépit d'épreuves comme la disparition de sa fille Kate, en 2013, puis une leucémie longue à guérir, elle a toujours chanté l'oeuvre de celui avec lequel elle forma un couple mythique dans les années 70.

Fille d'un grand résistant, David Birkin, décédé le jour des obsèques de Serge, et d'une actrice réputée, Judy Campbell, elle naît le 14 décembre 1946 à Londres. Elle est remarquée au cinéma dans "Blow up" de Michelangelo Antonioni (Palme d'or 67 à Cannes), où sa nudité fait scandale.

Elle a moins de 20 ans quand elle épouse le compositeur anglais John Barry, de 13 ans son aîné. Le couple a une fille, Kate. Il la quitte et elle décide de tenter sa chance à Paris. En 1968, sur le tournage du film "Slogan" de Pierre Grimblat, elle rencontre Gainsbourg.

A jamais unis dans l'imaginaire collectif, ils incarnent la créativité débridée d'une époque. Ils ont une fille, Charlotte. Jane pose sa voix en 1969 - "année érotique" - sur le sulfureux "Je t'aime, moi non plus".

Brigitte Bardot avait interdit la sortie de la version initiale dont elle était l'interprète, au moment de sa liaison avec "L'homme à la tête de chou". C'est un succès. En 1971, sort "Histoire de Melody Nelson", album-concept dessiné par Gainsbourg autour de Jane, échec commercial à sa sortie, devenu ensuite un classique.

Au cinéma

En 1980, elle quitte "Gainsbarre", noyé dans l'alcool, parfois violent. "Elle m'a jeté et c'était bien fait pour ma gueule, moi qui lui cassais la sienne" a-t-il lâché dans les Inrocks en 1987.

Elle devient la compagne du cinéaste Jacques Doillon, pendant 13 ans, et a une fille avec lui, Lou. Souvent cantonnée dans des rôles de nunuches, elle entame sa reconversion dans le cinéma d'auteur.

"Malgré les apparences, j'ai quelque chose d'infiniment triste en moi, un terrible sens de la culpabilité qui ne me quitte pas depuis l'enfance. Jacques a deviné ça en moi", expliquait-elle.

Au générique de quelque 70 films, elle a été choisie par des signatures comme Jacques Rivette, Bertrand Tavernier, Jean-Luc Godard, Alain Resnais, James Ivory ou Agnès Varda. Sans jamais se départir de son humilité: elle assure avoir un "instinct" d'actrice mais pas de "talent".

A l'Olympia

Sa relation avec Doillon ne l'empêche pas de continuer à chanter Gainsbourg. Et lui de continuer à écrire pour elle. Elle enregistre notamment "Baby Alone in Babylone" (1983), qui sera disque d'or. Mais ce n'est qu'à 40 ans passés, en 1987, qu'elle fait enfin ses débuts sur scène au Bataclan à Paris, enchaînant au Casino de Paris et à l'Olympia.

Artiste interprète féminine de l'année aux Victoires de la musique 92 en France, (puis récompensée d'une Victoire d'honneur pour sa carrière en 2021), elle est sur tous les fronts: elle joue au théâtre, donne des concerts en France et ailleurs, réalise un premier film "Oh! Pardon tu dormais" (sur un couple qui se déchire, inspiré par sa relation avec Barry).

En 1999, sort son premier disque sans Gainsbourg, avec des chansons écrites pour elle par des chanteurs-compositeurs français comme Françoise Hardy ou Alain Souchon. En 2008, paraît le premier album dont elle a écrit tous les textes, "Enfants d'hiver". Elle récidivera en 2020 avec le superbe "Oh! Pardon tu dormais", un disque conçu avec le compositeur et interprète français Etienne Daho.

"Inimaginable de vivre dans un monde sans ta lumière", a écrit ce dernier sur Instagram. Sheila, Patrick Bruel, Benjamin Biolay ont eux aussi salué sa mémoire.

Le fil rouge Gainsbourg

Draguée par les marques (le fameux sac Birkin chez Hermès), l'artiste s'est aussi engagée dans l'humanitaire et l'écologie. Mais elle revenait toujours à Gainsbourg, jouant ses morceaux en 2018 avec un orchestre classique: "Birkin Gainsbourg le symphonique".

"Revenir une fois de plus à Serge: je n'ai pas trouvé mieux", confiait la "petite Baby Doll" qui savait si bien sublimer ses textes.

ATS
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