Face aux violences, un centre "à l'écoute des victimes"

Solidarité femmes Fribourg soutient les victimes de violences domestiques, en leur offrant une écoute, un accompagnement et l'hébergement.

Martine Lachat-Clerc est la directrice du centre Solidarité femmes Fribourg. © La Télé

En 2021, 26 femmes sont mortes en Suisse sous les coups d’un homme de leur entourage. En marge de la journée internationale des droits des femmes qui s’est tenue le mardi 8 mars, Fribourg fait maison a invité Martine Lachat-Clerc, directrice du centre Solidarité femmes Fribourg, qui représente la première bouée de sauvetage pour les femmes et enfants contraints de quitter leur foyer.

Porter plainte contre son conjoint, c'est se reconnaître en tant que victime. Or, «c’est un sujet tabou, pour la victime elle-même. C’est compliqué pour elle de reconnaître qu’elle est victime de violences. Souvent, on parle de cycle de la violence. Il y a d’abord une période de tensions, ensuite il y a la période de l’agression qui est suivie de la période de justification. Et puis juste après cette lune de miel où le couple se remet ensemble, et la victime se convainc que la situation va s’améliorer et que c’est la dernière fois, mais ça repart. Donc il y a déjà cette complexité de se reconnaître en victime, ensuite il y a le fait qu’on ne connaît pas ses droits, on ne sait pas ce qui existe et où aller. On a peur de l’inconnu", explique Martine Lachat-Clerc.

Une peur de l'inconnu exacerbée par le fait que les victimes sont fréquemment isolées. L'auteur des violences va en effet "isoler sa victime, l'empêcher d'avoir un travail et une vie sociale". Un autre facteur est à prendre en compte: le lien émotionnel entre la victime et l'agresseur. "Les deux conjoints s’aiment, l’amour perdure malgré les violences, et porter plainte contre quelqu’un qu’on aime, qui est souvent le père de ses enfants, ce n'est pas facile!" Si la dénonciation est difficile pour la victime, la procédure pénale consécutive à la plainte peut tout autant l'être: "la procédure a pour objectif de punir l’auteur des violences, mais ne tient pas compte de la victime et de ses besoins", regrette Martine Lachat-Clerc.

"On les aide à comprendre ce qu’elles vivent, à fixer des objectifs"

Le canton de Fribourg a mandaté l'association en 1993 en tant que centre de consultation LAVI (Loi fédérale d'aide aux victimes d'infractions). Quel est son rôle? "La première chose qu'on fait, c’est d’accueillir les victimes, les écouter, les entendre, les croire", précise la directrice du centre d'accueil.

L'association va identifier les besoins des victimes, et les accompagner sur leur route. Elle les dirige vers des professionnels, des psychologues, des avocats ou même des cours d’autodéfense. Parfois, les victimes sont accompagnées directement par le centre, qui leur apporte un soutien psychosocial. "On les aide à comprendre ce qu’elles vivent, à fixer des objectifs. On les voit régulièrement, on les soutient dans leurs démarches administratives". 

Durant la pandémie, l'association a constaté une augmentation des appels téléphoniques. Paradoxalement, elle a dénombré une diminution des hébergements. Alors que le centre héberge habituellement 70 femmes à l'année, en 2021, "seules" 53 femmes ont profité des services du centre d'accueil. "On n'a pas assez de recul pour interpréter ces chiffres", précise Martine Lachat-Clerc, qui évoque tout de même la peur de sortir ou la distanciation sociale comme facteurs explicatifs.

Ce qui est certain, c'est que depuis décembre, la structure d'accueil affiche complet. "C'est malheureux", se désole-t-elle. "La victime de violence vit un certain traumatisme, et ce n'est pas juste que ce soit elle qui doive quitter son foyer!" Une nouvelle loi permet toutefois d'expulser les auteurs de violence du domicile conjugal. "Il était temps!", conclut Martine Lachat-Clerc.

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La Télé - Philippe Huwiler / Adaptation web: Marc Schaller
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