Margot Chauderna quitte la coprésidence des Jeunes Verts
La Fribourgeoise à la tête des Jeunes Verts suisse quitte officiellement son poste ce samedi lors de l'Assemblée générale du parti politique. Rencontre.
Vincent Dousse: Pourquoi quitter vos fonctions maintenant?
Margot Chauderna: parce que, après trois à la tête des Jeunes Verts suisse et avant cela, j'étais déjà au secrétariat. Cela fait presque quatre ans que je fais toutes les réunions des Jeunes Verts suisse. On est passé à travers différents cycles, les élections fédérales, quasiment tout le processus de l'initiative pour la responsabilité environnementale sur laquelle on a voté en février. C'est bien pour moi maintenant de laisser la place à une personne qui a moins de 30 ans et qui est motivée et qui a pleins de nouvelles idées.
Vincent Dousse : on dit souvent que le poste de président, c'est beaucoup de travail et c'est un peu ingrat. C'est quelque chose que vous avez ressenti?
Margot Chauderna: Ce qui n'est pas facile, c'est l'exposition. Le travail médiatique, ce n'est pas simple. Le fait d'être exposé, de toujours bien répondre, c'est une grande pression. Quand on est une femme et qu'on est jeune, on n'a pas forcément la même crédibilité quand on arrive dans un endroit. Aussi, entre la Suisse allemande et la Suisse romande, c'est ce qui est intéressant dans la coprésidence, on a des différences culturelles et il faut aussi parfois se mettre d'accord sur des divergences. Pour moi, c'était avant tout une chance et un honneur d'avoir cette place.
Vincent Dousse: avec l'allemand, cela s'est bien passé?
Margot Chauderna: Oui, ça a été. Heureusement à Fribourg, on s'entraine.
Vincent Dousse : qu'est-ce que vous retenez de ces trois années de coprésidence?
Margot Chauderna: Je retiens qu'on n'est pas sorti de l'auberge sur nos sujets, notamment les questions environnementales, les questions sociales et les liens entre les deux. On voit que le Parlement va toujours trop lentement là-dessus, alors qu'on se trouve dans une période dans laquelle l'Europe se réchauffe de plus en plus vite. On a dépassé les 1,5 degré alors qu'on aurait dû rester en dessous en termes de climat. Il y a encore beaucoup de travail, mais j'ai pu rencontrer beaucoup de militants et de militantes qui ont beaucoup d'énergie qui me donnent de l'espoir. Ils ont envie de se battre pour un avenir beau, désirable pour tout le monde.
Vincent Dousse : Tous les signaux climatiques sont au rouge et pourtant, dans les urnes, les Verts perdent des sièges, comment vous l'expliquer?
Margot Chauderna: Je dirais que, en effet, on perd des sièges et il faut que l'on se maintienne. C'est un grand défi de montrer ce que l'on fait, aussi parce que l'on n'a pas les majorités. On a quand maintenu un bon nombre de sièges par rapport ce que l'on avait après 2019. Quand on regarde les sujets, on a quand même gagné des votations importantes pour les mouvements écologistes l'année passée. Quand on regarde la votation contre les extensions des autoroutes, la treizième rente, la loi électricité. Ce sont deux choses différentes et cela reste une préoccupation.
Vincent Dousse : Êtes-vous inquiète pour l'année prochaine. À Fribourg, il y a des élections cantonales et communales. On se souvient de cette grande vague verte qui était arrivée dans le canton de Fribourg. Y a-t-il un risque de perdre des plumes?
Margot Chauderna: Il y a le risque, mais je suis avant tout motivée et pas vraiment inquiète. J'ai plutôt envie de me lancer dans cette campagne, de débattre et de montrer tout ce que l'on a pu faire en ville et au niveau de canton.
Vincent Dousse: on a l'impression que le contexte international est aussi peu favorable. L'arrivée de Donald Trump au pouvoir, l'inflation, les primes d'assurance maladie. Est-ce encore une priorité d'être vert ou écologique aujourd'hui pour la population?
Margot Chauderna: Cela reste une priorité parce que c'est factuel et les données sont scientifiques. Tout le monde est au courant et les gens voient les infos. C'est claire que les questions d'argent, c'est le quotidien de tout le monde et cela devient une priorité. Ce qui est important, c'est de voir que ces deux choses sont liées. On dit "fin du monde, fin du mois". C'est plutôt le même combat que des choses à opposer. Les questions de réchauffement climatique font qu'on fait des moins bonnes récoltes et donc le prix des aliments va augmenter. Si on traite les questions climatiques, on traite aussi des questions de porte-monnaie.
Vincent Dousse : pour vous, cela ne veut pas dire qu'il faut réorienter votre stratégie politique?
Margot Chauderna: Chez les Verts et chez les Jeunes Verts, on lie toujours ces questions environnementales et les questions sociales. On sait que le système économique exploite l'environnement et creuse les inégalités. Les gens deviennent toujours plus riches, ou bien toujours plus pauvres. Il faut plutôt qu'on appuie ce discours de ces combats qui vont ensemble. On a la réalité et il faut qu'on agisse sur les deux tableaux.
Vincent Dousse : est-ce que vous pensez que les autres partis se sont saisis des questions environnementales?
Margot Chauderna: vu que ce sont des faits scientifiques, tout le monde est obligé d'avoir un discours. Après, les jeunes Verts et les Verts restent les experts et les expertes de ce sujet. Il faut faire attention, car il y a des processus de greenwashing où il y a des partis, plutôt à droite, qui nous disent "mais regardez tout ce que l'on fait, on fait assez", alors qu'on ne fait pas assez, on le voit dans les chiffres. Il y a encore des partis climatosceptiques. Quand on a voté le 9 février dernier, l'UDC a demandé à ce qu'on sorte des accords de Paris. On voit que c'est assez grave et nous, on ne peut pas dire que les autres partis sont devenus verts.
Vincent Dousse: vous avez vécu personnellement tout le processus de l'initiative des jeunes verts pour une économie responsable qui respecte les limite planétaire. Est-ce que le résultat vous a déçu ? Comment vous l'interprétez?
Margot Chauderna: D'un côté, on s'y attendait. C'est compliqué de faire passer une initiative de manière générale. On est un peu déçu, inquiet et en même temps, pour un parti de jeunes, amener une initiative jusque dans les urnes, c'est déjà une victoire. On est fier d'avoir amené le sujet des limites planétaires et d'avoir débattu de notre système économique Ce ne sont pas des débats qu'on voit souvent dans les médias donc c'est déjà une victoire en soi. Quelques villes ont accepté comme la ville de Fribourg.
Vincent Dousse: Parlons de la suite. Quitter ce poste de coprésidence veut dire la fin de votre engagement politique ou qu'est-ce que ça veut dire?
Margot Chauderna: Non, cela ne veut pas dire la fin de mon engagement politique. Cela veut dire que cela sera un peu plus calme pour moi. Je continue chez les Jeunes Vertes jusqu'à ce que je n'aie plus le droit, à 35 ans. Je suis élue au conseil général de la Ville de Fribourg, aussi au niveau du canton, et je vais aussi continuer de militer, c'est sûr.
Vincent Dousse: un engagement plutôt cantonal plutôt que nationall, c'est ça ?
Margot Chauderna: Un engagement cantonal et communal en effet. Avec une amie, on aimerait aussi bien se lancer dans un projet de documentaire sur les femmes jeunes en politique.