Le Parlement israélien interdit l'UNRWA
Le Parlement israélien a voté lundi à une écrasante majorité en faveur d'un projet de loi interdisant les activités de l'agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) en Israël, malgré les objections des Etats-Unis et de l'ONU.
L'agence a dénoncé une mesure "scandaleuse" à l'encontre de cette agence, principal acteur des opérations humanitaires dans la bande de Gaza, assiégée et dévastée par plus d'un an de guerre entre Israël et le Hamas.
Pour le chef de l'UNRWA, le Suisse Philippe Lazzarini, cette interdiction "crée un dangereux précédent" et constitue le dernier épisode en date "d'une campagne en cours pour discréditer" l'agence. Il a estimé que son interdiction allait "aggraver les souffrances des Palestiniens".
Le Hamas a quant à lui dénoncé une "agression sioniste" contre les Palestiniens.
Le texte a été approuvé à la Knesset par 92 voix contre 10 alors qu'Israël, depuis longtemps très critique à l'égard de l'agence onusienne, a accusé certains employés de l'UNRWA d'avoir participé à l'attaque du Hamas dans le sud d'Israël le 7 octobre 2023 et d'être des combattants du mouvement islamiste palestinien.
"Un désastre"
Si cette interdiction est mise en oeuvre, "c'est un désastre, notamment en raison de l'impact qu'elle aura probablement sur les opérations humanitaires à Gaza et dans plusieurs parties de la Cisjordanie", a déclaré à l'AFP la porte-parole de l'UNRWA, Juliette Touma.
"L'UNRWA est la plus grande organisation humanitaire à Gaza et la principale responsable de la réponse humanitaire, notamment en matière d'abris, de nourriture et de soins de santé de base", a ajouté la porte-parole.
Le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, a toutefois affirmé qu'Israël, qui contrôle strictement l'entrée des cargaisons d'aide internationale, était "prêt" à fournir de l'aide humanitaire au territoire.
"Nous nous tenons prêts à travailler avec nos partenaires internationaux pour nous assurer qu'Israël continue à faciliter l'aide humanitaire à Gaza d'une façon qui ne menace pas la sécurité d'Israël", a dit M. Netanyahou sur le réseau social X.
Avant même le vote, les Etats-Unis s'étaient déclarés "très préoccupés" par le texte.
"Nous avons clairement fait savoir au gouvernement israélien que nous étions profondément préoccupés par cette proposition de loi [...] et nous exhortons le gouvernement israélien à ne pas l'approuver", avait déclaré le porte-parole du département d'Etat, Matthew Miller, réitérant le rôle "crucial" joué par l'agence dans la distribution de l'aide humanitaire dans la bande de Gaza.
Préoccupations et inquiétudes
Le premier ministre britannique Keir Starmer a affirmé que le Royaume-Uni était "gravement préoccupé" par "cette législation risque de rendre impossible le travail essentiel de l'UNRWA pour les Palestiniens".
L'Allemagne a "critiqué vivement" le vote israélien, qui rendra "effectivement impossible le travail de l'UNRWA à Gaza, en Cisjordanie et à Jérusalem-Est [...] mettant en péril l'aide humanitaire vitale pour des millions de personnes".
La Suisse a fait part sur le réseau social X de son inquiétude quant aux implications humanitaires, politiques et juridiques de cette décision.
Le Conseil de sécurité de l'ONU, y compris les Etats-Unis, avait mis en garde Israël le 10 octobre contre le vote de cette loi, au lendemain d'un avertissement similaire lancé par le secrétaire général de l'ONU, António Guterres.
Le texte, voté en première lecture en juillet, proposait d'interdire "les activités de l'UNRWA sur le territoire israélien", y compris à Jérusalem-Est, secteur de la ville sainte occupé et annexé par Israël depuis 1967.
"Colonne vertébrale"
"L'Etat d'Israël a le droit et le devoir, en tant qu'Etat souverain engagé dans sa survie, de lutter contre les menaces y compris celles qui existent en son coeur", a affirmé après le vote le député Yuli Edelstein, le président de la commission des affaires étrangères et de la défense.
"L'UNRWA n'est pas une agence d'aide pour les réfugiés. C'est une agence d'aide pour le Hamas", a ajouté le député Boaz Bismuth, l'un des co-auteurs du texte.
Cette agence, créée par l'assemblée générale de l'ONU en 1949, gère notamment des centres de santé et des écoles à Gaza et en Cisjordanie, et est considérée comme "la colonne vertébrale" de l'aide internationale à Gaza, en proie à un désastre humanitaire.
Certains des plus gros donateurs avaient suspendu leurs contributions en début d'année après qu'Israël a accusé une vingtaine des 13'000 employés de l'agence à Gaza d'avoir participé à l'attaque du 7 octobre 2023. La plupart des donateurs ont depuis repris leur soutien, à l'exception notable du principal, les Etats-Unis.